dimanche 9 octobre 2016

Ces choses que je ne sais pas [Journée mondiale du handicap]

Je ne sais pas ce que ça fait d'avoir le droit à des regards de travers quand je demande à passer aux caisses prioritaires mais que je n'ai pas l'air handicapée.

Je ne sais pas ce que ça fait de lutter tous les jours avec mon corps.

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir rester debout dans les transports en commun parce que personne n'a voulu me laisser sa place "parce que je n'ai pas l'air malade".

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir porter les conséquences de ma maladie en solo.

Je ne sais pas ce que ça fait d'avoir le regard des autres qui changent sur moi dès qu'ils apprennent.

Je ne sais pas ce que ça fait d'avoir moins de chance de trouver un travail juste parce que je suis malade.

Je ne sais pas ce que ça fait de naître malade.

Je ne sais pas ce que ça fait de le devenir et de s'entendre dire qu'il n'y a pas de remède.

Je ne sais pas ce que ça fait d'entendre "bonne année et surtout bonne santé, parce que si on n'a pas la santé on n'a rien", et de ne pas avoir la santé.

Je ne sais pas ce que ça fait d'être en fauteuil et de ne pas pouvoir aller partout.

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir m'appuyer sur les autres pour des choses simples.

Je ne sais pas ce que ça fait d'être constamment fatiguée.

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir prendre des traitements lourds.

Je ne sais pas ce que ça fait d'être prise pour une menteuse et une flemmarde quand je ne peux pas venir en cours à cause des douleurs.

Je ne sais pas ce que ça fait, les douleurs constantes.

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir prouver mon handicap, comme si j'étais une grugeuse de pension d'invalidité.

Je ne sais pas ce que ça fait, d'être déclarée handicapée.

Je ne sais rien de ça. Et de beaucoup d'autres choses encore. Je saurais peut-être un jour. Pas tout de suite. Mais je sais ce que ça fait de s'inquiéter pour quelqu'un et de serrer les poings de rage quand tu vois comment son entourage traite sa maladie (déni), quand tu vois qu'il n'y a rien à faire, et quand tu vois qu'elle s'oblige à tenir debout toute seule parce que c'est ce qu'on lui a inculqué. Je sais ce que ça fait d'aimer quelqu'un et de ne rien pouvoir changer à sa souffrance.
Alors j'aimerais profiter de la visibilité que j'ai un peu ici pour passer le message qu'une de mes amies a posté sur son mur facebook :
Rappelez-vous qu'un handicap n'est pas toujours visible. Mais que c'est toujours difficile.

Souvent, on ne peut pas agir pour la recherche, pour trouver un traitement, pour tout ça. Mais on peut agir. En enlevant le poids de nos regards de valides.



3 commentaires:

  1. J'aurai pu écrire ton dernier paragraphe... Ma mère est handicapée et je m'occupe de malade qui sont devenu invalide ou qui ont des difficultés à la mobilisation. Des gens démunis qui ont parfois bien du mal avec la maladie et dont les autres se fiche.

    Et je connais bien plus de handicap invisible que visible. Si les gens cessaient de juger ça irai tellement mieux...

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    1. C'est vrai qu'avec ton métier tu dois y être particulièrement sensible.

      Ou si les gens s'informaient simplement, aussi. Mais bon, ça va souvent ensemble.

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  2. Il est bien, ton article... Tu écris toujours avec délicatesse et sensibilité.

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