lundi 24 octobre 2016

Je ne suis pas un monstre

Je viens de voir passer les dessins d'un gars sur mon Twitter. Pendant Inktober, il a représenté les maladies mentales sous la forme de monstres.

Et, non.
On regarde déjà les bipolaires, les dépressifs, les autistes, les schizophrènes, tout ça, comme des monstres. On a pas besoin de plus de clichés, de préjugés, de plus de représentations de nous en tant que monstres bizarres inhumains.
Nous ne sommes pas des monstres.
Nous ne sommes pas des maladies qu'on représente.

Y'a déjà tellement de stigmatisations, de clichés autour de tout ça. Est-ce qu'on a vraiment besoin d'en rajouter une couche ?

Quel effet ça a de voir que pour un artiste toi et ta maladie vous êtes des monstres ?
Je sais pas.
Moi ça m'a fait mal au ventre.
Pour la petite anecdote, c'est dur de s'approprier un diagnostique de maladie. Parce qu'on te le pose sur ce qui a été toi jusque là et que ça t'écrase un peu et qu'il faut faire la vie à nouveau avec ces mots sur toi.
Quand on m'a dit que j'étais bipolaire c'était difficile. Je sais pas à quel point ça l'aurait été plus si on m'avait dit "tu es bipolaire" et qu'on m'avait montré un monstre à deux tête dégoulinant comme nouvelle représentation de moi, de cette identité que je portais désormais en moi.
Il s'avère en fait que je ne suis probablement pas bipolaire (un jour je reviendrais sur les diagnostiques pro VS auto-diagnostiques) mais autiste (youpi une nouvelle étiquette).
C'est un diagnostique qui a été très libérateur. C'est un mot que j'aime avoir près de moi parce qu'il m'aide à m'expliquer à moi-même et qu'il fait décroître ma culpabilité.
Je n'ai pas envie de voir ça comme un monstre qui me ruine et qui arrache tout.
Pourtant ça arrive.

A quel moment tu te dis que c'est bien de représenter toute une maladie et les humains derrières de cette façon ? Punaise.


Si je devais représenter certains troubles que j'ai je leur ferais des visages atroces. Des griffes qui se plantent pour la dépression et une bouche qui hurle sans fin. Mais c'est moi. C'est mon trouble. Je la représente comme ça parce que je la connais de l'intérieur.
ça me viendrait pas à l'idée de représenter le trouble de la personnalité borderline d'un autre humain que je connais. C'est le sien. Même si je sais ce que c'est de manière théorique.
Et d'ailleurs je pense vraiment qu'on a pas besoin de plus de représentation de l'horreur que c'est. En tout cas pas avec des visuels comme ça.

Mais c'est urgent qu'on associe troubles mentaux et humains derrière.
Y'a Anne Betton qui a fait ça merveilleusement bien en prenant en photo des personnes bipolaires, dépressives, etc...de manière totalement normale. Comme on aurait pris en photo n'importe qui. Personne qui hurle, qui tape sa tête contre les murs...Parce que nous ne sommes pas que ça.
Il y a ça.
Je me tape la tête contre les murs.
Je pleure.
Je crie.
Je me griffe.
Il y a le noir et l'horreur dans la maladie mentale, oui.
Mais c'est intime.
Si tu me suis avec un appareil photo tous les jours tu ne me verras pas faire ça. Voire tu me verras mener une vie vraiment très normale et tu seras déçu.
Et pourtant. C'est ça aussi la maladie. Le quotidien, le banal, l'humain.
Regarde ça avant de me dessiner en monstre.

vendredi 21 octobre 2016

Nanotera, nanotera pas...

Novembre approche à grands pas. Ok, ça on est d'accord, les feuilles sont rouges et dorées et je suis en train de kiffer la vibe, comme disent les jeunes, mais une Grande Question se pose. Suspens suspens.
(Un jour je m'achèterai un beau style d'écriture promis mais je suis tellement, tellement, tellement fatiguée).

Retour en "arrière". En mai 2015 j'ai terminé le premier jet de mon premier roman. Depuis le 1er septembre 2015, je le réécris de A à Z, avec un énorme remaniement de la structure (parce que c'est bien connu que je suis ultra maniaque des structures (en fait non, mais maintenant je te le dis : tu peux avoir la meilleur histoire les meilleurs personnages le meilleur style, bosse la structure sa mère la châtaigne sinon c'est fou-tu)), la moitié des personnages en moins, une absence très notable de dialogues (je les pourfends tel Stephen King, ce fameux pourfendeurs d'adverbes), un bien meilleur style, bref, tout est mieux, j'ai vieilli.
Mais donc ça fait plus d'un an que je suis sur ma réécriture. Et donc trois ans que je suis sur ce livre. Et il m'en restera encore après ce second jet. C'est long, c'est difficile, et j'ai beau aimer ce livre, bah, y'en a d'autres sur lesquels j'aimerai me pencher, parce qu'en trois ans j'ai pas mal grandit, évolué, et que des livres continuent à taper au carreau dans ma tête en mode "hé mais t'avais dit que t'allais t'occuper de nous bientôt", bref.
J'étais vachement jeune quand j'ai commencé à écrire La Fille-couleur (finalement c'est ce titre choisi au pifomètre qui va finir par rester, j'arrive pas à décider d'un autre). J'avais 17 ans punaise, j'avais même pas encore passé mon bac (c'était avant, c'était pendant que je tentais de réviser mon bac d'anglais mais évidemment j'ai pas fait ça).

Donc Novembre approchant, j'ai réfléchis. Beaucoup.
Et j'ai envie d'aller me frotter au Nanowrimo une seconde fois.
Pourtant je m'étais dit non, non, non, plus jamais, c'était beaucoup trop, j'avais plus de vie, rien, horrible, ha.

Donc j'ai fais une liste de pour et de contre.

POUR

- ça me permettrait de terminer le deuxième jet d'ici novembre
- c'était quand même drôle comme challenge
- la gloare
- J'aime bien souffrir
- Peut-être que ça peut me permettre de réintégrer l'écriture intensément dans ma vie
- ça sera probablement pas aussi nul que la première fois

CONTRE

- Je suis trop avancée dans le livre pour pouvoir réellement aller au bout des 50 000 mots, et c'est un peu nul de savoir d'avance que ça va pas marcher du coup
- C'est super épuisant
- J'ai quand même un peu du boulot à côté (un peu)
- ça va mettre tous les autres trucs (le blog, la lecture, le Youtube, l'aquarelle...)
- Si c'est pour refaire des choses nulles comme la première fois non merci ça en vaut pas la peine
- Si je veux le faire en me mettant pas la pression, je vais pas respecter les règles et écrire jusqu'à ce que j'ai terminé mon roman puis faire compter tout ce que j'ai écris auparavant dans le Nano. Mais du coup est-ce que la torture ça en vaut la peine ?
- Et si en fait ça me dégoûte d'écrire ?

Comme tu le vois, c'est un dilemme (en fait non).
Je sais pas trop.
La moitié des arguments pour se base sur ma capacité à me lancer dans des trucs durs et intenses qui vont être un peu la souffrance juste pour me sentir vivante et badass, et l'autre moitié c'est "je finirais mon livre plus vite".
J'ai peur de me lancer dedans et de m'épuiser absolument. Du coup j'essaye de me dire que je vais le faire en respectant mes cuillères mais je sais très bien que je sais pas faire ça.

Donc c'est compliqué dans ma tête.

Nanotera, nanotera pas ?
La suite au prochain épisode.

lundi 17 octobre 2016

Je ne sais pas écrire hors de moi

Aujourd'hui je te partage un poème parce que j'ai pas trop de cuillères pour les articles compliqués et que je me bats contre Juvénal et ses Satires qui sont impossibles à traduire - vraiment impossibles.

Si je savais écrire.
J'écrirais sur tout.
Je parlerai de la formation des romans. Parce qu'ils ont formé ma vie. Et j'aime ce lien de miroir.
Je veux fondre en larmes.

J'ai défendu mon côté atypique tout en restant dans une confortable écriture de moi
Et je
Continuerai.
Je n'écris qu'en boucle, qu'en boucle autour de moi - Et les cercles de plombs se fracassent en silence.
Et dans mon malheur je n'ai pas l'apanage de l'originalité - J'existe et j'ai mal
Elle l'a dit avant moi, mon cas n'est pas unique.

Mélanger les voix.
Je suis imprégnée de Simone de Beauvoir, de Violette Leduc, et de Virginia Woolf.
Je suis une romantique quoi que j'en dise et je cris mon mal du siècle et je suis las viejas poetas qui sont seuls à souffrir, seuls au monde, pour qui le boulanger n'existe pas. Pourtant le paradoxe, je suis toutes ces existences, je les aime toutes, je voudrais toutes les dires et toutes leur donner la parole à travers moi.
Je n'écrirais jamais l'abstraction.
Je ne suis pas l'abstraction.
J'existe violemment, dos à dos contre tout le monde parce que l'existence des autres interdit la mienne.
Et je sors mon poème ou mon couteau.

Je suis un poème qui marche et qui s'écrit au fil des pages.
Je suis le cœur de mon mystère.
La rencontre des autres m'a soignée et je voudrais tout rendre, tout résoudre par mon existence.
Mais ça ne guérit personne quand je parle.
Je fais couler mon poison
Pour le sortir
Ça ne fait de bien à personne
Je me sens seule
Tout en sachant que je ne suis pas unique
Et si je n'ai pas cette identité
J'existe comment ?

Marginale marginale
Pas assez marginale

Je veux danser sous la pluie
Enfin être
Libre
Et sauvage
Et pas
Junto a la vida
Mais ancrée
Les pieds dans cette non-abstraction
Et devenir arbre
Semblable à tous
Et nécessaire.

mardi 11 octobre 2016

Un féminisme où les hommes seraient des alliés ?

Récemment, j'ai eu un débat en live avec un homme que je connais.
C'était fatiguant.
Et ça s'est poursuivi sur facebook parce que j'ai pas été capable de fermer ma bouche en lisant "féminisme débilisant".

Ce qui était le plus décevant dans tout ça c'était le côté "mais si je suis pour l'égalité homme/femme je suis un féministe mais juste le mouvement devrait pas se construire comme ça / y'a plus important / nous aussi on est opprimé / mais non vous confondez tout.".

Je me suis rarement battue avec des femmes au sujet du féminisme. J'ai rarement lu des débats où la personne qui utilise toutes les ruses rhétoriques pour gagner la partie (détournement des arguments, réponds à côté, occulte une partie du raisonnement) est une femme.
J'ai toujours dû tenter de légitimer ce terme aux yeux des hommes.
Toujours dû rassurer "mais non je sais bien que tous les hommes ne sont pas comme ça."
Être gentille.
Pas trop agressive.
Pédagogue.



Je sais pas si vous le savez mais faire dans la pédagogie quand on vous heurte (oui me sortir en face qu'on est mieux placé que moi pour parler de comment on ressent une agression sexuelle c'est violent, sorry not sorry personne qui se reconnaîtra dans ce message s'il le lit)(boum je règle mes comptes via le blog, que suis-je devenue) c'est épuisant. Réexpliquer sans cesse les mêmes bases à des personnes qui ne cherchent même pas à s'informer c'est épuisant.
Les gens, je ne suis pas votre maman, internet existe, les livres existent, youtube existe, des contenus pédagogiques il y en a partout, à la porté d'à peu près tous les niveaux de déconstruction.

Aussi, le féminisme n'a pas besoin d'être à propos de vous. Le féminisme, c'est une reprise de parole de la part des femmes, pour les femmes. Et pas contre les hommes, mais contre une oppression systémique basée sur le critère de genre.
Alors oui, bien sûr il y a aussi des oppressions faites aux hommes, à cause du même système, et souvent vous vous plaignez qu'on n'en parle pas.
Mais j'aimerais savoir combien dans tous ceux qui l'ont utilisé comme un argument en avaient subi.
Combien, dans tous les gars qui m'ont sortis "oui mais les hommes aussi se font violer par les femmes", l'on été. Combien des mecs qui se sont plaints à moi que le père n'a jamais la garde des enfants / de congé parental pour s'occuper de ses enfants on réellement des enfants. Combien de ceux qui ont évoqué les violences conjugales envers les hommes en ont souffert.
Les souffrances qui ne sont pas les votre ne peuvent pas être un instrument dont vous vous servez quand ça vous arrange.
C'est exactement la même chose que quand on répond à un végétarien qu'en attendant y'en a qui crèvent de faim en Afrique (l'Afrique, ce magnifique pays dans lequel on va piocher des exemples de misère quand ça nous arrange *soupir d'ironie blasée*). Vous ne pouvez pas défendre des causes quand ça vous arrange. Et surtout, instrumentaliser une souffrance pour attaquer une cause qui se bat contre des oppressions systémiques, c'est dangereux.
Si des choses bougent du côté de la représentation des genres - et donc du côté des oppressions masculines aussi, ça n'a pas l'air d'être clair dans vos têtes -, ce ne sera pas grâce à vous. Mais aux autres. A ceux qui ne perdent pas leur temps en cassant de la/du féministe et en essayant de lui expliquer comment devrait être son mouvement et sur quoi il devrait se concentrer.

Pour moi un féminisme où les hommes sont les alliés c'est un féminisme où ils ne cherchent pas sans cesse à attirer la parole à eux.
Un homme avec un vécu de victime qui est lié au sexisme ou au patriarcat a toute sa place dans un espace de parole féministe, et j'irais même jusqu'à dire qu'il est nécessaire au féminisme.
Un homme qui se sert du vécu de victimes pour décrédibiliser un mouvement devrait juste...se taire. En fait.



Oui voilà.
Si vous voulez être des alliés, respectez la parole des femmes.
(Et si vous êtes vraiment respectueux, personne vous volera dans les plumes en vous disant que vous ne l'êtes pas)(promis)(en général les gens ne sont pas paranos vous êtes juste aveugles à leur ressenti).


dimanche 9 octobre 2016

Ces choses que je ne sais pas [Journée mondiale du handicap]

Je ne sais pas ce que ça fait d'avoir le droit à des regards de travers quand je demande à passer aux caisses prioritaires mais que je n'ai pas l'air handicapée.

Je ne sais pas ce que ça fait de lutter tous les jours avec mon corps.

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir rester debout dans les transports en commun parce que personne n'a voulu me laisser sa place "parce que je n'ai pas l'air malade".

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir porter les conséquences de ma maladie en solo.

Je ne sais pas ce que ça fait d'avoir le regard des autres qui changent sur moi dès qu'ils apprennent.

Je ne sais pas ce que ça fait d'avoir moins de chance de trouver un travail juste parce que je suis malade.

Je ne sais pas ce que ça fait de naître malade.

Je ne sais pas ce que ça fait de le devenir et de s'entendre dire qu'il n'y a pas de remède.

Je ne sais pas ce que ça fait d'entendre "bonne année et surtout bonne santé, parce que si on n'a pas la santé on n'a rien", et de ne pas avoir la santé.

Je ne sais pas ce que ça fait d'être en fauteuil et de ne pas pouvoir aller partout.

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir m'appuyer sur les autres pour des choses simples.

Je ne sais pas ce que ça fait d'être constamment fatiguée.

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir prendre des traitements lourds.

Je ne sais pas ce que ça fait d'être prise pour une menteuse et une flemmarde quand je ne peux pas venir en cours à cause des douleurs.

Je ne sais pas ce que ça fait, les douleurs constantes.

Je ne sais pas ce que ça fait de devoir prouver mon handicap, comme si j'étais une grugeuse de pension d'invalidité.

Je ne sais pas ce que ça fait, d'être déclarée handicapée.

Je ne sais rien de ça. Et de beaucoup d'autres choses encore. Je saurais peut-être un jour. Pas tout de suite. Mais je sais ce que ça fait de s'inquiéter pour quelqu'un et de serrer les poings de rage quand tu vois comment son entourage traite sa maladie (déni), quand tu vois qu'il n'y a rien à faire, et quand tu vois qu'elle s'oblige à tenir debout toute seule parce que c'est ce qu'on lui a inculqué. Je sais ce que ça fait d'aimer quelqu'un et de ne rien pouvoir changer à sa souffrance.
Alors j'aimerais profiter de la visibilité que j'ai un peu ici pour passer le message qu'une de mes amies a posté sur son mur facebook :
Rappelez-vous qu'un handicap n'est pas toujours visible. Mais que c'est toujours difficile.

Souvent, on ne peut pas agir pour la recherche, pour trouver un traitement, pour tout ça. Mais on peut agir. En enlevant le poids de nos regards de valides.



mardi 4 octobre 2016

Le bullet journal, les cuillères et moi

Alors oui, oui, je sais, il y a déjà deux milliards d'articles et quelques sur le bullet journal dans l'internet entier.
Mais pouet.
J'avais envie de te parler de comment le bullet journal ça pouvait être un outil formidable en cas de maladie mentale qui fait que tu as des cuillères (attend tu vas voir). Les cuillères, on en parle pour les maladies physiques invalidantes (Margot de la chaîne Youtube Vivre Avec l'explique très bien). En gros pour une journée tu vas avoir, mettons, sept cuillères, qui vont représenter ton niveau d'énergie. Faire un truc = des cuillères en moins. Sauf que ça va plus ou moins vite (par exemple elle explique qu'une douche c'est une cuillère, se laver les cheveux c'est une de plus, les transports en commun aussi, faire à manger, monter l'escalier, etc...).

Pour moi, avec mes troubles-têtes, j'ai des journées avec plus ou moins de cuillères.
Mettons que c'est une journée à 6 cuillères (donc pas trop dormi et phase down), avec des TCA, que j'ai emporté ma nourriture pour le midi, et que c'est un mardi (par exemple).
-Réveil deux heures avant les cours, j'ai le temps pour moi, je lis, j'imprime mon latin, je traîne. Je gratte une cuillère.
7 cuillères.
-10h30 c'est l'heure du latin. Y aller ça prend une cuillère. Une cuillère encore pendant le cours parce qu'il faut parler.
On en est donc à 5 cuillères.
-12h30 c'est l'heure du midi. Le mardi je retrouve pas de gens précis donc c'est un peu l'angoisse de trouver un endroit pour manger. Moins une cuillère. Puis il faut manger. Comme on est un jour de TCA un peu marqués manger ça prend encore une cuillère à cause de l'angoisse.
Et bim, 3 cuillères.
-13h30 c'est l'heure de la littérature francophone. C'est pas un cours trop à cuillères parce que y'a pas beaucoup d'ennui et que y'a pas besoin d'interaction.
-Après c'est la BU. En général je travaille le latin. Suivant la difficulté ça prend une à deux cuillères. Si c'est la difficulté normale ça prend deux cuillères.
Boum, il reste une cuillère.
-18h30, c'est le polonais. Le cours est difficile et il prend deux cuillères.
On en est à moins deux cuillères.
-20h30, on rentre (-1). S'il faut faire à manger encore et prendre toutes les décisions en charge (qu'est-ce qu'on mange et tout), c'est encore moins une cuillère. Comme c'est souvent ça on va la compter en moins.
Donc avec une journée normale je peux finir à -3 cuillères.

Ce qui fait que le lendemain, qui est le mercredi, j'aurais pas toutes mes cuillères restaurées. On tournera autour de 3-4 cuillères le matin. +1 si j'arrive à me lever très tôt pour prendre le temps pour moi. Puis y'aura la matinée de cours (-3), le repas (-1 parce que y'aura des gens pour décider à ma place), le cours de l'après-midi (-1), le retour (-2 parce que heure de pointe). Donc je serais entre -3 et -4 cuillères et j'aurais fait que mes journées normales de cours. Et je t'ai épargné.e les cuillères que ça peut prendre d'aller faire les courses ou que le Fou insiste trop pour que je range et que ça finisse en dispute.

Quelles conséquences ça a sur ma vie ? Et bah. Si je ne fais pas attention, si je pousse trop mes limites physiques ou mentales, si j'en exige trop de moi, je finis sans cuillères.
ça laisse la porte grande ouverte à la dépression, aux pensées suicidaires, aux angoisses, et il me faut du temps de rien, de solitude et de repos pour pouvoir reprendre la vie normale. Parce que oui, y'a aussi des jours où c'est presque comme si j'avais pas la limite des cuillères. Et "presque", hein. Dans les jours de cuillères les interactions sociales ça m'en enlève de plus en plus et heureusement que j'ai les week-ends pour me reposer. Là j'ai sauté beaucoup de week-end de repos, et je le sens passer, j'ai dû sécher des cours parce que sinon ça allait être impossible de tenir.

Bref.
Tout ça pour dire que le bullet journal, outil sensé améliorer sensiblement ta productivité et te rendre capable de faire tout un tas de trucs et dans lequel on voit souvent des to-do list à rallonge et qui est super bien décoré, ça avait pas l'air d'être pour moi. Et de fait, j'avais tenté et ça ne l'était pas.
Puis cet été, à la recherche de quelque chose qui me permettrait de ne pas tout faire reposer sur mon pauvre cerveau (j'ai une excellente mémoire donc je n'ai pas besoin de noter les trucs à faire), je me suis dis "et si je tentais le bullet journal mais en mode pas soigné et avec des to-do list minimalistes ?".

Donc j'ai tenté.
J'ai fais les pages classiques (calendrier annuel, index, etc.) mais au final je ne m'en sers absolument pas.
J'ai une page pour le mois où je note mes "trackers" (des habitudes que tu veux suivre). J'ai un tracker pour les jours où je me lave les cheveux (je cherche à retrouver mon rythme d'un par semaine que j'avais avant de faire n'importe quoi l'an dernier), un pour les jours où j'écris et un pour le blog.

Octobre avant qu'il se passe des choses.

Après pour la semaine je note les objectifs / trucs à faire impérativement puis tous les jours je fais une petite liste que je coche si accompli ou pas.

Comme tu peux le voir je ne me casse pas la tête avec des couleurs, du masking tape, des jolies écritures et autres trucs décoratifs.
Parfois je raye quand je n'ai pas assez de cuillères pour le faire (et c'est pas grave)(vendredi par exemple était un jour sans cuillères), et comme tu peux le voir je fais vraiment des listes très petites et j'essaye de me mettre un truc concernant l'écriture / le blog par jour. Parfois si je fais plus de choses que prévues dans la journée je les écris quand même parce que ça me permet de me rendre compte que même avec mes cuillères pas super élevées je peux faire des choses (aussi j'essaye de noter les trucs à faire en fonction des cuillères pour pas me retrouver avec des journées où j'avais prévu plein de trucs mais où au final j'aurais rien fait).
J'ai aussi une page qui me sert pour suivre l'évolution de mon roman en cours avec le nombre de pages / de mots, le "où qu'on en est des chapitres", puis pour plus tard "où qu'on en est de la deuxième correction" (oui là c'est la réécriture). ça m'aide un peu pour voir ce qu'il me reste à faire et l'évolution actuelle des choses.


Comme tu peux le voir je ne m'embête pas non plus à souligner les titres à la règle.

Donc, pour limiter cet article qui est déjà assez long (sorry not sorry) : le bullet journal, ça me libère des cuillères. Un des gros trucs qui me mange des cuillères, c'est le stress. En ayant un système d'organisation, je gagne une impression que contrôle et de productivité qui est rassurante.
Le système a ses limites (parce que ça ne me permet de gérer le stress que quand j'ai assez d'énergie pour faire des trucs, si j'ai déjà pas beaucoup de cuillères ça peut se faire manger en entier par l'angoisse) mais ça m'aide vraiment vraiment beaucoup.

Et toi tu fais des boulettes ?