dimanche 8 décembre 2013

Génération blasée

L'autre jour, en littérature anglaise, alors qu'on était censé répondre à des questions sur le poème The Unknown Citizen de je sais plus qui (Auden ?), on s'est mis à discuter, trois amis et moi-même, sur le futur. Notre futur. Ce qu'on voulait faire plus tard, t'sais.
La réponse est sans appel : rien. Pour aucun de nous quatre.
Il y en avait un dingue de musique, une de théâtre, une d'art et de peinture surtout, et une dingue de mots (coucouceymwa). Avec chacune de ces passions, il est possible d'avoir un métier raisonnable (par exemple, je pourrais être journaliste)(vous en entendrez parler bientôt du journalisme, si je suis motivée).
Sauf qu'aucun de nous a envie de travailler toute sa vie pour faire un truc qu'il n'avait pas envie de faire.

Et si tu regardes bien, il y a tellement de gens qui ne savent pas quoi faire. Faut dire que c'est pas trop la joie, on te sort : "ça c'est difficile. ça aussi. ça aussi. ça c'est sélectif, t'as intérêt à être une tête. Quoi, tu veux pas faire un bac S/ES/truc à insertion professionnelle facile ? T'es tellement pas prêt pour la vie dans ce monde !".

C'était mieux avant, une amie m'a dit.
C'était mieux avant dans tous les domaines.
L'art évoluait, la littérature évoluait (rien à foutre, j'inventerais le new-romantisme), la mode évoluait, tout était en mouvement.
Aujourd'hui, l'art s'appuie sur le passé, et même si on voit encore des choses magnifiques (par exemple, ceci), il n'y a rien de neuf. La littérature d'aujourd'hui, bon. Je vais me faire brûler si je donne mon point de vue (y'a quand même Marc Lévy dedans, quoi)(mais heureusement il est pas représentatif) donc je vais le garder pour moi. Pour ce qui est de la mode, je peux constater un immense retour vers les années 60-70-80 (après, je sais pas trop, étant donné que je mute en sorte de sweet lolita version foncé la mode d'aujourd'hui c'est point trop ma tasse de thé) avec quelques éléments novateurs mais quand même, tout se base beaucoup sur le passé.

Je sais pas vous, mais j'ai l'impression que tout le monde se dit que tout a été fait (et je partage parfois cet avis) et que le monde se laisse porter en attendant de voir ce qui va arriver.
C'est valable en économie, aussi. On rame pour essayer de revenir en arrière alors qu'il serait plus simple de tout laisser tomber et de faire autre chose.

Sauf que faire autre chose...Faire quoi ? Personne ne sait quoi faire, et au fond très peu ont envie de faire quelque chose. Il y a bien quelques allumés pour vouloir changer le monde, mais quoi, ils sont encore au lycée, quand ils rentreront dans la "vraie" vie, ils comprendront. Ou alors c'est des utopistes qui vivent dans un monde de bisounours et ce en quoi ils croient ne sera jamais applicable.

Je suis un bisounours, ok. Mais un bisounours badass.


ça m'a fait rire, je lisais un truc qui parlait de désillusion au sortir de l'adolescence, mais j'ai comme l'impression qu'on essaye de nous désillusionner avant. Dès l'enfance, presque.

Je vois tellement de gens blasé que ça me blase en retour. Râler c'est bien beau mais ça ne change rien (auto-critique, je suis la première à râler sur tout et n'importe quoi). Dire que la vie c'est de la merde ne résout rien non plus et ne la rend pas plus belle.

Génération blasée, j'aimerais te voir bouger. Il faudra bien qu'un jour toute cette insatisfaction soit un moteur au lieu d'être un poids.

8 commentaires:

  1. Aaaah il faut arrêter de se dire que c'était mieux avant, c'est la solution de facilité ! Il y a plein de choses à faire encore, il faut juste trouver sa voie et parfois ça peut prendre du temps. Mais le pessimise n'apporte rien de bon, utilisez cette énergie de façon positive !! Et puis des fois il faut s'écouter soi même avant d'écouter les autres. Si j'avais écouté les autres qui me disaient que je n'arriverai jamais à faire telle étude et qu'il fallait que je fasse ça, aujourd'hui je ferais un boulot qui ne me plairais pas. Allez on positive !!

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    1. Ah l'avenir ... " quand je serai grand " et finalement une fois qu'on y est .. on ne sait plus rien du tout. Merci les désillusions de la vie ! mais gardons le sourire :) les trois filles de http://zebraranolia.wordpress.com garde espoir...

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  2. Tu parles juste, dame qui aime les mots. (j'ai failli mettre "Hugh") (mince, c'est fait)
    Je vais te commenter paragraphe par paragraphe (han un commentaire linéaire, ceypasbien, diraient les profs de français) (osef je sais)

    §1 : Dis-moi (et pour ça, réfléchis très longtemps si nécessaire) : y a-t-il quelque chose à qui/quoi tu sois prête à vouer ta vie ? Si oui, qui/quoi ? Et, oui ou non, dis-toi bien cela : on vit assez longtemps pour changer de "vie" environ tous les 7 ans. Tu peux ainsi être journaliste, écrivaine, tireuse à l'arc, professeure, documentaliste, archiviste (attention je vais dire n'importe quoi) skieuse, voyageuse, amoureuse et 3 autres trucs encore. Toute ta vie la même chose ? Non. Certes non. Ce sera même le cas de la plupart des gens. Ah et : 30% des métiers que notre génération exercera n'existe pas encore.

    §2 : La société est trop élitiste. Oh mais, wait, on a dit quoi en géo ? Ah oui : "La mondialisation augmente significativement les inégalités à toutes les échelles". Si, ça a un rapport. Inégalité des chances, on n'y pense pas tout de suite (parce qu'on pense à l'argent-dieu-tout-puissant), mais il est là.
    Et sur ce sujet : http://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99%C3%89tranger

    §3 : Je suis toujours révolté quand on me dit "c'était mieux avant". J'ai lu suffisamment de textes en latin qui critiquaient le présent en disant que c'était mieux avant. Essayez de changer quelque chose, puis vous pouvez parler. Non mais.
    Viens on fonde nos mouvements littéraires :D J'avais essayé en faisant mon recueil de nouvelles, mais je m'y suis tenu que pour 2 ou 3 des 13 nouvelles, et ça avait pas grand intérêt. Il nous faut une bonne idée. Sinon, en art, il y a toujours des mouvements actuels (voir "héliocentrisme" en arts picturaux). Bon, la musique fleurit autant qu'elle ne fane, alors bon, que dire. Et pauvre théâtre, pauvre poésie laissés pour morts sur les ultimes bords du monde de l'art. Bref.
    Cette histoire de "tout se base sur le passé" : la société est très conservatrice, donc ceci explique cela.

    §4 : "Tout", c'est un absolu. Bien qu'en quête d'absolu, je refuse d'accorder ce qualificatif à quoi que ce soit (non, ça n'est pas paradoxal, une quête n'est pas marrante si elle est déjà finie, et j'ai des arguments). Bref, tout, c'est pas tout, en fait. Positivons.
    Et quant à l'économie, je te présente mon ami (bon, je le connaissais pas et il est mort, mais bon, mon compatriote de pensée) (oui j'ai des pays dans ma tête) : Stéphane Hessel. Initiateur du mouvement des Indignés. Grand altermondialiste parmi les altermondialistes. L'altermondialisme, au fait, c'est bien "tout laisser tomber" et "faire autre chose".

    §5 : Stéphane Hessel n'était pas au lycée, à 94 ans. Que dire alors de Sartre ? De Brecht (grand Idéaliste des idéalistes, tourné vers le futur comme le montre son poème "À ceux qui naîtront après nous") ? De tous les autres qui veulent ou ont voulu changer ce monde ? Et eux, je voudrais pas dire, mais ils savaient quoi faire. Ma prof d'histoire-géo aussi. Ma prof d'allemand, ma mère, mon père. Tout le monde sait quoi faire, au fond. Il nous faut un geai moqueur. On verra ensuite si les gens le suivent ou pas. Enfin, l'exemple de Stéphane Hessel est plutôt celui d'un geai moqueur. Mais je suis d'avis que ce mouvement a été médiatiquement étouffé. Bref.

    §6 : La désillusion n'est pas forcément induite volontairement. Comment éviter cette désillusion "à ceux qui naîtront après nous" ?

    §7 : Agis alors. On est déjà deux. J'ai mes parents et deux profs avec moi. Et aussi Ama, la Lionne, et au moins 2 autres amis. Et Decay, bien évidemment, et Mercu. C'est un bon début non ?

    §8 : Parfaitement d'accord.

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    1. (un commentaire linéaire ceypasbien mais ceybienpratique)

      Je pourrais jamais répondre à ce genre de question sans une boule de cristal, mais je dirais que je suis prête à vouer ma vie aux livres, aux mots et à tout les trucs du genre. Et aussi, je pourrais passer ma vie à tenter de faire le bien. (et, je le redis, j'ai pas envie d'avoir un métier)(même un métier qui existe potentiellement).

      Absolument d'accord.

      Je crois qu'on a lu les mêmes. Et ça ne me dérange pas d'entendre un "c'était mieux avant" mais justifié (par exemple, je pense que la littérature (du moins française) était mieux avant, tout comme certains penseront que la musique était mieux avant, simplement parce qu'aujourd'hui ils ne trouvent pas leur compte dans la musique). Le "c'était mieux avant" de base me fait vriller.
      Owi ! (je me suis rendu compte que j'allais juste refaire le romantisme, en fait, donc je cherche encore). La mort du théâtre et de la poésie me désespèrent. (et ça m'énerve, le côté "suivons le mos majorum". On est pas plus moderne que les antiques romains, en fait).

      Certes, tout c'est pas tout puisque l'absolu n'est pas dans notre vie. Et j'ai entendu parler de l'altermondialisme, j'ai trouvé ça génial, puis j'ai oublié de me renseigner dessus (idiote).

      Ils sont morts. Et c'est tout.Tout le monde sait quoi faire, oh, non. Une grande majorité ne sait pas quoi faire, et ne veut rien faire parce qu'au fond c'est plus confortable de ne rien faire.

      On dirait un peu quand même (juste un peu). Et je sais pas comment.

      Ouais enfin...C'est très, très facile à dire. Agis, certes. Mais comment ? Là est la question.

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    2. Il ne faut pas se dire que c'est un métier : il faut se dire que c'est l'assouvissement de ta passion qui est reconnu par tes congénères humains comme apportant de la richesse (dans tous les sens du terme) à la société, et qui, par conséquent, est rémunérée, afin de te permettre de vivre et de continuer l'assouvissement de ta passion.

      Non, certes, un "c'était mieux avant" justifié se... justifie (mais c'est tout de même se tourner vers le passé). En fait, il ne faut pas se border à ça, juste se dire : bon, maintenant, à moi de changer les choses. La littérature, c'était mieux avant ? Ok. Je crée mon mouvement littéraire et je tente de rendre la littérature meilleure. Et pareil dans tous les domaines.
      Faut se créer une nouvelle conversation mail sur ce sujet ^^ Après "Bertolt Brecht", "Nouveau mouvement littéraire" ! ^^
      La poésie, elle a vraiment quasiment disparu (sauf peut-être dans le slam, qui tente tant bien que mal de la maintenir en vie (sous perfusion)) (je te conseille, dans la même veine, "Song of Myself", de Nightwish, la 4e partie, non chantée, est constituée de poèmes lus sur de la musique, c'est très beau, c'est de la poésie telle qu'on devrait en entendre, je trouve.)
      Quant au Mos Majorum, certes, on est tournés vers le passé, on a plein de tabous (on en a justement parlé mercredi en latin, pile avant que Decay ne sorte son article sur le Tabou de la sexualité), etc, etc, mais cependant, une partie de la société (Artistes engagés, ONGs, recherche, etc.) reste tournée vers le futur. C'est un peu ambivalent.

      L'altermondialisme, c'est le bien. Je te conseille "Indignez-vous !" et "Engagez-vous !" de Stéphane Hessel. Bons résumés.

      Ils sont morts, oui, mais ils savaient quoi faire dans leur société, dans leur monde à ce moment-là, alors certes, nous, tout le monde ne sait pas quoi faire, mais à la limite, pas grave, on n'a pas besoin d'une majorité, juste d'une minorité qui se fait bien entendre et qui transmet de manière efficace ses idées.

      Il y a une part de volontaire. Mais certains parents, ou profs, par ex, le transmettent involontairement.
      Je sais pas non plus comment, mais le fait est qu'il faut s'occuper de nos Nachgeborenen, parce que c'est notre futur, que c'est la société humaine qui est en jeu, et que, par conséquent, par altruisme, je pense qu'on se doit de la construire la plus agréable possible.

      C'est facile à dire, je te le concède, cependant : pourquoi crois-tu que j'aie fait un blog ? C'est un premier pas vers l'engagement, que tu as déjà franchi, comme Decay. Maintenant, il faut en parler autour de soi, à des adultes, bâtir des réseaux, défendre nos idées dans des débats, créer des œuvres littéraires et/ou philosophiques engagées, etc. Et au fond, c'est pas si dur. C'est même d'une déconcertante facilité. Ça s'appelle communiquer.

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    3. Je veux juste qu'on me laisse tranquille avec un clavier devant moi (et cherche pas, aucun métier me permet de le faire totalement, je devrais me contenter d'un compromis).
      Imagine par exemple un non-musicien mais amateur de musique qui voudrait changer la musique. Il ne pourrait pas, cependant il continuerait à penser que c'était mieux avant.
      (on a du boulot devant nous, petit Remucer)
      Je sais pas ce qu'il faudrait pour la faire revivre. C'est, je pense, la façon de voir des gens qui est a changer, pas la poésie. (je suis allée voir après ton article dessus. Pas mal du tout).
      Une toooute petite partie même si je suis d'accord que c'est mieux que rien (ceci dit, il faudra un jour briser les codes).

      J'en avais entendu parler. Quand j'aurais fini Guerre et Paix (dans 50 ans) je lirais.

      Ma psy m'avait sorti ça un jour : "ce ne sont jamais les grandes majorités qui font bouger les choses".

      (chouette, j'ai appris un mot en allemand) je suis tout à fait d'accord.

      Oh, merci, j'ai une idée maintenant.

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  3. Oh oui Tiphaine, c'mon, on passera notre vie toutes les deux sans métier, on ira sous les ponts, j'prendrai ma guitare et tu chanteras tes textes qui viseront à changer la face du monde. Yo !
    Blague à part, j'ai plusieurs choses à commenter. Commençons, mettons, pas le "c'était mieux avant". Déjà, on oublie fort que quand on réduit le "avant" au XXe siècle, on ne va pas bien loin. Rendons nous compte que le Moyen Âge a duré presque un millénaire si je ne dis pas de bêtises, et qu'en ce temps là on a beaucoup moins évolué (ou en tout cas beaucoup moins rapidement) qu'on évolue à présent, et il y avait des situations bien pires que la notre (que ce soit politiquement ou socialement ou que sais je) ! Donc je suis d'accord qu'il y a plein de choses à changer dans notre monde, mais l'argument "c'était mieux avant" ne tient pas et ne tiendra jamais. Il y avait du bon comme du mauvais avant, et c'est toujours le cas (même si là, je manichéise les choses, pour les simplifier). Par exemple si je prend l'art graphique, on a l'art nouveau, le hip hop, l'art contemporain, qui sont très nouveaux et où on peut trouver des trucs géniaux.
    Bon ensuite, je dois dire que j'approuve ce que tu dis, il faut se bouger un peu le cul sans se contenter d'être blaser. J'en même fortement convaincue. Mais je n'arrive juste pas le moins du monde à l'appliquer à moi même, et du coup je me sens lâche. ._.
    Et sinon, bah, bon article. (Et là, j'ai plus du tout le temps de rédiger plus, donc je dois terminer vite fait mal fait ce commentaire décousu).
    Bisous et paillettes !

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    1. Je suis partante ! (sauf pour le coup de chanter. Non non. Moi pas faire ça ^^).
      Oooooh pour le coup du Moyen-Âge je t'aime. C'est vrai qu'on oublie que avant "avant", y'a eu un avant (oui, j'adore ma phrase). (oh mon dieu, toi, manichéenne ? ^^). Et je me répète : c'est pas parce qu'il y a pire ailleurs que ça ne vaut pas la peine qu'on essaye de l'améliorer. Pour l'art, tu as raison.
      (bienvenue au club des gens qui se sentent lâches).
      (niveau commentaire décousu, je pense que je te bats ^^)

      Paillettes sur toi !

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