mercredi 21 décembre 2016

D'être fasciné.e (ou échouer à être)

Cette nuit j'ai fais un cauchemar bizarre et je voudrais ne pas te parler de ça mais te parler d'un truc qui me touche en tant qu'humain d'internet.
Les gens me fascinent.
Mais pas souvent les gens que je rencontre dans le vrai d'abord.
Je suis fascinée par le contact écrit. Quand je lis l'humain je suis fortement attirée, mais pas toujours. Il faut des conditions particulières, il faut des gens que je ne pourrais jamais être mais qui sont ce que j'aurais été si je n'avais pas toujours choisi la voie la plus facile - s'il n'y avait pas eu cette immense fatigue l'angoisse la dépression toute cette lourdeur.
Des êtres multiples perçus comme des reflets de moi.
Je lis souvent les blogs que je découvre d'une traite, quand j'en aime l'auteur.
J'ai cliqué sur "blog suivant", j'ai découvert lui, qui s'appelle comme le premier personnage que j'ai crée de mes doigts d'écrivaine - c'était Yann et il chassait des monstres pour avoir de l'argent et délivrer sa princesse ou je sais pas quoi et puis au dernier moment il décidait qu'il préférait encore chasser des monstres que de rentrer dans le rang (mais j'ai un peu grandis depuis et beaucoup vieilli, c'était il y a douze ans)(mais j'écris toujours sur des monstres, même si ça se voit moins) - et donc il écrit des choses qui me donnent envie de le connaître et qui en même temps me font mal.
Je suis fascinée par les gens.
Parce que parfois les gens me font me rappeler à quel point la vie est grandiose, à quel point il y a des humains magnifiques, mais aussi à quel point je ne suis pas de ceux-là.
Je ne parle jamais à ces gens d'internet ils me font peur parce que je voudrais un contact très fort et que ça n'arrive bien souvent pas, c'est décevant internet pour ça le déséquilibre qu'il y a dans la relation.

Il y a des personnes que j'ai rencontré sur internet, mais c'était pas si violent la fascination de départ.
Sauf pour Remucer.
Maintenant Remucer c'est quelqu'un dans ma vie réelle avec qui j'arrive à être tout de moi y compris les parties qui sont pas glorieuses. Mais je me paye toujours un énorme sentiment d'infériorité, surtout quand il vient jouer sur mon terrain et que je me rends compte que vraiment lui m'est inaccessible mais que je ne le suis pas pour lui.
Mais va c'est pas grave on survit à ça.

C'est drôle d'être.
Je sais pas toi mais je me suis pensée unique jusqu'à mes dix-sept ans. Après j'ai compris que je ne l'étais pas, j'ai compris qu'il y avait des fous bien plus fous que moi, que tout ce que j'étais d'autres l'avaient été mieux, que ma combinaison de je suis une enfant adulte littéraire scientifique et j'aime Virginia Woolf et Harry Potter et j'ai les cheveux rouges et violets parce que j'aime montrer à quel point c'est bizarre dans moi, tout ça, c'était rien de spécial, j'étais juste une enfant de seize ans je m'aimais et me haïssais.
Maintenant j'ai les cheveux bruns courts et j'aime être invisible.
J'écris mes choses dans le creux de moi.
Je vis sans être la plus brillante.

J'ai toujours l'impression d'être la fascinée.
Celle qui a son petit blog avec sa micro-communauté de lecteurs et qui n'attirera jamais les foules ou la fascination au point où les autres me fascinent.
Je voulais être un génie je ne suis qu'un minuscule humain.
Alors je m'enivre des autres.
Je ne suis pas eux.
Je les prends en secret et je les mélanges à moi. J'en fais des histoires où tout le monde me dépasse parce qu'ils sont tous plus entiers, plus eux, que moi.



Comment tu fais pour arriver à être quand rien n'est vraiment dans ton monde.
Les 3/4 des endroits où je vis sont une fiction ancrée dans une réalité. J'ai l'impression que l'univers n'est pas réel si je ne l'ai pas incorporé dans mes fictions.

Pourquoi tu crois que mon champs de recherche - si on m'avait laissé le choix - ça aurait été la littérature du quotidien.
Le temps dans la fiction.
Pourquoi j'ai été fascinée par Figures III  de Gérard Genette (de la narratologie surtout). Parce que le réel et la fiction ça ne fait que s'interpénétrer normalement.
Mais quand dans ta tête tout est fiction, et donc tout est réel, alors les gens que tu rencontre dans internet, les mondes que tu découvres en lisant, tout ça c'est la même chose, alors ça devient complètement fascinant.

Ce qui me fait encore une fois réfléchir à ce rapport qu'il y a entre le blog et l'identité. Souvent quand on lit mon blog on me connait mieux que juste "dans la vie". Enfin c'était le cas quand j'étais au lycée. Maintenant c'est à peu près équivalent, suivant qui vous êtes.
Du coup le blog ça devient autre chose pour moi et je sais pas trop comment le gérer, j'ai presque plus trop besoin de compenser à outrance mon sentiment d'être invisible et de ne pas avoir le droit de parler (enfin, un peu quand même) et j'ai mon très grand perfectionnisme qui remonte à la surface et qui me dit que je dois me composer une image, avoir une identité virtuelle claire et définie, une ligne éditoriale ou autre. Qu'il faudrait peut-être que j'arrête d'écrire des articles que je trouve bof et me mettre à produire de la qualité, plutôt que...Que ce que je fais là.
Alors c'est compliqué, tu vois.

Je voulais te parler de ma fascination pour les gens de l'internet qui sont tous mieux que moi, toujours.
Qui ont toujours l'air de mieux réussir à être eux, qui parfois ont l'air de mieux réussir à être moi.
Je vais retourner à mon labeur de correction du roman.
Parce qu'écrire c'est un peu tout ce que je sais faire - être - tout ça.
Non cette phrase n'a pas d'autre sens que visuel.
C'est pas grave.


6 commentaires:

  1. Lorsque je suis tentée de me dire que je suis insignifiante, que les autres font mieux, sont plus importants, plus intéressants, plus fous, je me rappelle que les plus grands murs se font avec le plus de brique, et que chaque brique apporte quelque chose.
    Tu as quelque chose à apporter, Tiphaine. Tes écrits, tes articles, tes romans, tes pensées, tes mots, ton existence-même apporte quelque chose à ce grand mur, et il serait terriblement triste, dommage et affreux que tu te restreignes. Dis-toi, sans cesse, que l'existence a besoin de toi, de tes pensées, de tes folies, parce que tu AS quelque chose à apporter. Forcément. Que ce soit en écrivant un jour quelque chose de grandiose, en inspirant quelqu'un, en donnant du courage, en étant juste toi-même.
    Ne t'inquiète pas, continue de créer, de t'exprimer, d'exister, parce que c'est très important, ton existence et ton petit univers personnel.

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    1. Je vais recopier ça et le coller quelque part histoire de pouvoir le lire tous les matins en me levant je crois.
      Merci beaucoup d'avoir dit tout ça (je ne savais même pas que tu lisais encore mon blog, dit ^^), ça m'a fait beaucoup de bien de le lire, même si je ne sais pas tellement quoi répondre ^^'

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  2. Je crois que... on a tous quelque chose à apporter, au final, aux personnes qui gravitent autour de nous, plus ou moins loin... même si je t'avouerais que moi aussi, souvent, je lis des gens et je me dis qu'ils écrivent tellement mieux que moi et que donc jamais je n'impressionnerais personne. Une amie m'a dit que j'écrivais bien mais, si elle lisait les autres "auteurs en herbe" que j'ai lus elle ne dirait sans doute pas ça. J'écris à peu près, je me débrouille plus ou moins, juste suffisamment pour déverser mes personnages sur du papier virtuel. Mais je crois quand même que l'on a tous quelque chose à apporter, sinon on ne serait pas là ! Ou pas de cette manière, ou pas avec ces gens-là.

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    1. (je voulais pas laisser ton commentaire sans réponse mais je sais pas vraiment quoi répondre mais juste, merci <3)

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    2. De rien, haha :)

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  3. Est-ce que cette fascination douloureuse n'est pas, d'une certaine manière, l'expression d'un désir profond et intense de contact humain, mais que la peur, peur déclenchée par les douleurs, les rejets passés, rend difficile, presque impossible - parce que se lier avec un humain touchant, c'est se rendre vulnérable ?

    Tu sais, quand je viens jouer sur ton terrain... Je ne sais pas. Je crois que je le fais parce que je sais que c'est le seul univers suffisamment large où on peut pétiller tous les deux. Un truc comme ça. Mais je suis triste si je te fais mal. Je sais pas trop quoi dire.

    Je crois que je me pense encore unique. (Tu es unique.)
    Je pense que ce mot, "unique", cache autre chose. Je ne sais pas trop quoi. Un besoin de reconnaissance de soi, de cet univers émotionnel si intense qui évolue en nous ? (Tu n'as pas besoin de briller pour qu'on t'aime.)

    Tu n'es pas un minuscule humain. L'idée du génie est une construction sociale qui fait suite à la pensée de l'individu, du "soi" séparable du "tout". Ceux que tu perçois comme génies se sont, je crois, aussi constitués en se nourrissant des autres.

    Comment je fais pour arriver à être quand rien n'est vraiment dans mon monde ?
    Je crois que je sécrète mon monde autour de moi.

    J'ai du mal à penser le lien fiction-réalité de manière à dire quelque chose de pertinent, là. Mais on en reparlera si tu veux. En tout cas, câlin.

    En fait ton perfectionnisme qui te pousse à croire qu'il faut que tu arrêtes ça. C'est. Ce qui t'empêche d'avancer. Si tu fais ces articles c'est que tu en as besoin : fais-les. Continue. Beaucoup. Partage. Sois.
    Et après peut-être que tu en auras moins besoin et que tu pourras vraiment faire, l'âme légère, ce que ton perfectionnisme veut que tu fasses - ce que, au fond, tu veux faire mais n'arrives pas encore ?
    Tant que tu crois qu'il faut être sur ton blog autre-chose que toi tu ne cesseras pas de te faire du mal.

    Il n'y a personne qui réussit mieux à être toi que toi. Mais il y a des personnes qui te donnent l'impression de mieux réussir à être ce que tu crois vouloir être que toi.
    Mais c'est un leurre. Dès que tu gagnes la puissance d'aller vers qui tu veux vraiment être, tu prends conscience, émotionnellement conscience, qu'il ne peut y avoir que toi sur le chemin - et que ça n'empêche pas d'échanger avec les autres, qu'au contraire, accepter son chemin permet de mieux échanger.

    Je sais pas si ça t'aide - émotionnellement, effectivement. Mais je vais continuer à blablater jusqu'à ce que tu t'aimes bien. Câlin.

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